dimanche 24 novembre 2013

La Charte ne va pas assez loin

Certains pensent que la Charte va trop loin.

Au contraire. Je pense qu’elle ne va pas assez loin.

Parce que la Charte, si elle veut vraiment poursuivre la longue marche vers la laïcité entamée lors de la Révolution tranquille, devrait également s’appliquer dans deux domaines: celui des écoles privées religieuses, et celui des exemptions fiscales accordées aux organismes religieux.

Comment expliquer qu’on finance à 60% des écoles où les enfants sont embrigadés dans la religion* de leurs parents? Si des parents veulent inculquer à leur progéniture une croyance qui leur est propre, je n’ai pas moi, comme contribuable, à financer leur point de vue.

Qu’ils le payent entièrement de leur poche.

Pourquoi l’État, s’il est vraiment laïc, devrait-il cautionner ces croyances religieuses ? Si ces parents sont si convaincus des bienfaits de leur religion, qu’ils assument le plein prix de leur croyance. “Put your money where your mouth is”, comme le veut le dicton.

Comment expliquer, pareillement, que les organismes religieux bénéficient de toutes sortes d’exemptions qui ne sont pas accordées à des organismes laïcs ? C’est absurde. Il suffit d’un tampon “religieux” pour que des aliments ou des produits qui dans d’autres circonstances seraient imposés deviennent comme par magie exemptés de taxes… Vous importez du chocolat pour la St-Valentin, vous payez des taxes. Vous importez du chocolat pour une fête religieuse, bye bye la taxe.

Pourquoi la religion serait-elle un passe-droit qui permet d’éviter de se soumettre aux obligations qui sont imposées au reste de la société ?

C’est un merveilleux cas de “deux poids, deux mesures”. “Moi j’ai le droit, nananère, c’est ma religion. Toi tu crois en rien, ou tu gardes ta religion pour toi, alors sèche et passe ton tour”.

Si le sujet des écoles privées religieuses vous intéresse, je vous conseille la lecture d’un rapport passionnant intitulé Le fait religieux dans les écoles privées au Québec, produit pour le compte du ministère de l’Éducation, qui date de juin 2012.

Les auteurs écrivent la chose suivante:
La question du financement par l’État des écoles privées et, parmi elles, des écoles privées confessionnelles, est posée publiquement. Il s’agit d’une question politique qui concerne toute la société. C’est donc à elle qu’il revient de décider du financement public du réseau privé et, le cas échéant, de la hauteur de ce financement.

On y trouve aussi des informations surprenantes:
Les écoles apostoliques arméniennes et les écoles juives sont celles qui regroupent le plus grand pourcentage d’élèves appartenant à leur communauté respective. En 2001,1 084 élèves fréquentaient les écoles apostoliques arméniennes, ce qui représentait 59 % de la population d’âge scolaire de cette communauté.Quant aux écoles juives, leurs 7036 élèves de 2001 comptaient pour 52 % des enfants d’âge scolaire de cette tradition.
Parmi les exemples d’activités religieuses dans les écoles, voici ce qui a été noté par les auteurs du rapport:
Par exemple, un directeur d’école, qui est aussi prêtre, anime tous les matins une prière pour les élèves de son établissement. Dans des écoles juives, le rabbin de la communauté vient régulièrement rencontrer les élèves pour faire avec eux la prière. Il en va de même du pasteur dans certaines écoles protestantes.
Enfin, quant à l’application du programme du ministère, j’ai noté cette phrase qui m’a fait tiquer:
De petites écoles de tradition protestante appliquent, à la place du PFEQ, un programme d’origine américaine’” utilisé également pour la scolarisation à la maison. Il revient donc à ces écoles de faire la démonstration que l’application de ce programme répond aux normes ministérielles. Le point de vue évangélique de ce programme, où les références à la Bible sont nombreuses, a tendance à teinter la plupart des apprentissages faits par les élèves.
Si des parents veulent que l’apprentissage des livres saints  ”teinte la plupart des apprentissages faits par les élèves”, pourquoi devrais-je les encourager dans leur délire en payant pour leur croyance ?

 *ATTENTION: Je parle ici de TOUTES les religions, pas d’une ou l’autre en particulier. Vous avez bien saisi ? Toutes les religions, je n’en montre pas une du doigt.

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